N.M. (nom supprimé) c. Suisse, Communication No. 116/1998, U.N. Doc. CAT/C/24/D/116/1998 (2000).
Présentée par : N. M. (nom supprimé)
[représenté par un conseil]
Au nom de : L'auteur
Etat partie : Suisse
Date de la communication : 10 juillet 1998
Le Comité contre la torture , institué conformément à l'article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,
Réuni le 9 mai 2000,
Ayant achevé l'examen de la communication No 116/1998 présentée au Comité contre la torture en vertu de l'article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,
Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par l'auteur de la communication et l'Etat partie,
Adopte la décision suivante :
1.1 L'auteur de la communication est
M. N. M., citoyen de la République démocratique du Congo (RDC), né le 10 janvier
1968, et vivant actuellement en Suisse où il a demandé l'asile le 1er décembre
1997. Cette demande ayant été rejetée, il soutient que son rapatriement forcé
vers la RDC constituerait une violation par la Suisse de l'article 3 de la Convention
contre la torture. Il est représenté par un conseil.
1.2 Conformément au paragraphe 3 de l'article 22 de la Convention, le Comité
a porté la communication à l'attention de l'Etat partie le 23 septembre 1998.
Dans le même temps, le Comité, agissant en vertu du paragraphe 9 de l'article
108 de son règlement intérieur, a demandé à l'Etat partie de ne pas expulser
l'auteur vers la RDC tant que sa communication serait en cours d'examen. Le
23 novembre 1998, l'Etat partie a informé le Comité que des mesures avaient
été prises pour faire en sorte que l'auteur ne soit pas renvoyé vers la RDC
tant que sa communication serait pendante devant le Comité.
Rappel des faits présentés par l'auteur
2.1 L'auteur prétend avoir travaillé à Kinshasa entre 1992 et 1997 comme employé
d'une société dénommée Hyochade et appartenant à M. Kongolo Mobutu, le fils
de l'ex-président Mobutu. Selon l'auteur, cette société était une couverture
pour piller les richesses du pays de différentes manières comme le racket des
entrepreneurs étrangers, mais aussi pour organiser des manifestations qui requièrent
des autorisations de l'État. La société ne payait aucune taxe et n'avait aucune
obligation administrative. Hyochade entreprenait également, pour le régime,
des activités de propagande et de recensement des membres de l'opposition afin
de garder ces derniers sous un certain contrôle.
2.2 L'auteur explique que son travail consistait à jouer l'intermédiaire dans
certaines transactions commerciales comme l'obtention d'autorisations pour des
hommes d'affaires étrangers. Mais ses responsabilités comprenaient également
le rassemblement d'informations sur des membres de l'opposition dans une zone
géographique déterminée pour dénoncer toute activité subversive. Un jour, il
dénonça le père d'un de ses amis qui fut torturé à mort. L'auteur avance qu'il
faisait rapport à ses supérieurs au moins tous les deux mois et qu'il était
généreusement payé. Outre son salaire, il recevait des primes de dénonciation
et bénéficiait de toute une série d'autres privilèges.
2.3 Durant cette période, tant ses amis que ses ennemis l'avertissaient que
ces activités pourraient être un jour dangereuses pour lui. Ses parents, et
en particulier son père, tentaient de le convaincre d'abandonner ce travail
et de retourner à l'université. L'auteur quitta finalement Hyochade en janvier
1997 et retourna chez ses parents dans l'attente d'une occasion de reprendre
les cours à l'université.
2.4 Le 17 mai 1997, la rébellion conduite par M. Kabila entrait dans Kinshasa.
Dans la nuit du 18 juin 1997, des soldats firent irruption dans la maison des
parents de l'auteur pour arrêter ce dernier. En son absence, les soldats appréhendèrent
son père. Ayant appris ce qui était arrivé à sa famille, l'auteur décida d'aller
se cacher dans le Bas-Zaïre où il habita chez un ami jusqu'à la mi-septembre.
Il attrapa alors la fièvre typhoïde et décida de rentrer à Kinshasa où il habita
chez sa soeur.
2.5 Le 6 octobre 1997, son père fut relâché à condition de se présenter au poste
militaire toutes les deux semaines jusqu'à ce que l'auteur revienne. Le jour
de sa libération, le père vint rendre visite à l'auteur, mais fut suivi par
trois officiers en civil munis d'un mandat d'arrêt et de sa photo. L'auteur
fut arrêté et emmené au camp militaire de Kokolo. Son père ne fut autorisé à
l'accompagner que jusqu'à l'entrée.
2.6 L'auteur affirme qu'il fut isolé dans une cellule durant trois jours sans
nourriture. Il fut ensuite emmené au bureau du commandant du camp où il apprit
qu'il était accusé de trahison, d'extorsion et de complicité de meurtre. Alors
qu'il niait ces charges, il fut, sur ordre du commandant, emmené dans une autre
cellule où il fut battu par plusieurs soldats et reçut des coups sur ses parties
génitales. Il resta à l'hôpital jusqu'au 25 novembre 1997 lorsqu'un médecin,
soudoyé par sa soeur, l'aida à s'échapper; il décida alors de quitter le pays
immédiatement.
2.7 A son arrivée en Suisse, le 1er décembre 1997, il fit une demande d'asile
: elle fut rejetée par l'Office fédéral des réfugiés le 25 mars 1998. Il introduisit
alors un recours contre cette dernière décision qui fut déclaré irrecevable
le 18 juin 1998 par la Commission suisse de recours en matière d'asile au motif
que l'auteur n'avait payé la totalité des sommes requises pour assurer les frais
de procédure que quatre jours après la date limite.
Teneur de la plainte
3.1 L'auteur déclare que s'il est refoulé en RDC, il serait victime d'actes
de torture et ferait l'objet d'une exécution sommaire. Le fait que son activité
professionnelle se déroulait dans son quartier, qu'il avait envoyé de nombreuses
personnes de ce même quartier à la mort sinon à la torture, qu'il jouissait
de nombreux privilèges sont autant d'éléments qui permettent de considérer que
l'auteur n'a sûrement pas été oublié et que s'il revenait à Kinshasa, on lui
réserverait un sort à la mesure de ses actes. Les nombreuses pièces qu'il a
produites durant sa procédure d'asile constituent également des motifs sérieux
de croire à la réalité de cette crainte.
Observations de l'Etat partie
4.1 Dans un courrier du 23 novembre 1998, l'Etat partie déclare ne pas contester
la recevabilité de la communication. Néanmoins, dans ses observations du 11
mars 1999, il demande au Comité qu'il s'assure que la même question n'est pas
pendante devant une autre instance internationale d'enquête ou de règlement.
4.2 Par rapport au bien-fondé de la communication, l'Etat partie souligne tout
d'abord que conformément à la jurisprudence du Comité (1), il ne s'oppose pas
du tout au caractère absolu de l'article 3. Il souligne également que si la
crainte de l'auteur doit être analysée par rapport à la situation générale prévalant
dans le pays, il faut également déterminer que cette crainte est personnelle,
réelle et prévisible.
4.3 L'Etat partie relève que l'auteur a fait de nombreuses déclarations contradictoires
au cours de ses auditions sur des points essentiels de son récit. Ainsi, lors
de sa première audition, l'auteur n'a pas parlé des événements du 18 juin 1997
et a même précisé qu'il n'avait connu aucun problème avec les nouvelles autorités
congolaises avant le 6 octobre 1997. En outre, les circonstances entourant son
départ de Kinshasa pour le Bas-Zaïre n'ont été évoquées que lors de la seconde
audition. Il s'est également contredit à propos de la personne qui l'a aidé
à sortir de l'hôpital, en disant la première fois qu'il s'agissait d'un infirmier,
et la deuxième fois qu'il s'agissait d'un médecin. Enfin, au début de sa seconde
audition, il pouvait donner le nom de cette dernière personne et son adresse
approximative, alors qu'il ne s'en souvenait plus un peu plus tard. L'Etat partie
relève que l'auteur n'a donné aucune explication à ces contradictions dans sa
communication.
4.4 Par ailleurs, l'Etat partie met en doute la vraisemblance de certains faits
que l'auteur n'a soulevés qu'en fin de procédure, sans raison apparente, mais
qui pouvaient renforcer ses motifs d'asile. Il a notamment avancé que travailler
pour Hyochade impliquait qu'il fallait être membre du MPR (parti unique du régime
du président Mobutu). Quant aux raisons de son arrestation d'octobre 1997, ce
n'est qu'en fin de procédure qu'il a invoqué la trahison, la complicité d'assassinat
et le détournement.
4.5 De l'avis de l'Etat partie, certains éléments du récit de l'auteur sont
complètement invraisemblables, comme le fait de s'être échappé de l'hôpital
sur un lit roulant caché sous un drap. Des doutes sérieux existent aussi par
rapport à la fuite de son pays dans la mesure où il a gagné l'Europe par avion,
le moyen de transport le plus surveillé, alors qu'il prétend avoir été recherché
pour des faits graves.
4.6 L'Etat partie estime qu'il est surprenant que l'auteur n'ait pas produit
de certificat médical alors qu'il prétendait garder des séquelles des actes
de torture qu'il avait endurés et que ces derniers étaient suffisamment récents
pour qu'un médecin puisse constater leur réalité. Aucun document probant ne
vient donc expliquer les contradictions de l'auteur et, partant, il ne peut
tirer argument de la jurisprudence du Comité selon laquelle les "effets
d'un état réactionnel aigu à une situation éprouvante, comme dans le cas de
nombreuses victimes de la torture" peuvent expliquer "les discordances
qui apparaissent dans [certaines] déclarations" (2).
4.7 Reconnaissant qu'avoir été victime de torture dans le passé n'est pas une
condition nécessaire pour craindre avec raison de tels actes à l'avenir, l'Etat
partie fait néanmoins remarquer qu'il n'existe pas chez l'auteur d'éléments
supplémentaires qui pourraient prouver l'existence de ce risque. Ainsi, en se
référant à la décision du Comité dans la communication Seid Mortesa Aemei c.
Suisse (3), il constate que l'auteur, même si sa position au sein d'Hyochade
avait réellement impliqué son affiliation au MPR, n'a pas mené d'activités politiques
suffisamment importantes pour estimer que le gouvernement actuel le persécuterait.
4.8 L'Etat partie émet de sérieux doutes quant à l'activité professionnelle
de l'auteur et l'existence même de la société Hyochade dans la mesure où l'auteur
n'a jamais été en mesure de produire aucun document concernant son travail dans
cette entreprise alors qu'il a pu se procurer une série d'autres documents et
que sa famille, sur place, aurait pu l'aider dans cette recherche. Au surplus,
l'Etat partie considère que pour que le travail d'informateur de l'auteur soit
vraiment efficace, il aurait du être aidé par d'autres informateurs. Or l'auteur
a toujours précisé qu'il travaillait seul, ce qui apparaît incohérent aux yeux
de l'Etat partie.
4.9 Au sujet du manque de preuves, l'Etat partie formule la même remarque qu'au
paragraphe précédent à propos de la fuite de l'auteur de l'hôpital : sa soeur
ou la personne qui l'a aidé aurait pu fournir une attestation.
4.10 Enfin, quant à la situation générale qui règne en RDC, l'Etat partie se
soumet aux observations du Comité dans l'affaire X, Y et Z c. Suède (4) et rappelle
que, jusqu'à présent, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés
n'a pas formulé de recommandations tendant à conseiller que les demandeurs d'asile
déboutés ne soient pas reconduits dans ce pays.
Observations supplémentaires de l'auteur
5.1 Par une lettre du 28 avril 1999, l'auteur a formulé des remarques relatives
aux observations de l'Etat partie sur le bien-fondé de la communication.
5.2 En ce qui concerne les contradictions relevées par l'Etat partie dans les
récits de l'auteur, ce dernier renvoie au recours qui a été introduit devant
la Commission suisse de recours en matière d'asile le 30 avril 1998 et dans
lequel toutes les explications sont données à ce sujet. Il y est précisé notamment
que s'il n'a en effet pas été retranscrit lors de la première audition qu'il
avait eu des problèmes avec les autorités le 18 juin 1997, l'auteur avait en
fait voulu dire qu'il n'avait pas subi de sévices corporels de la part des autorités
avant le 6 octobre de la même année. Sur ce même point, l'auteur attire aussi
l'attention sur le fait que les problèmes rencontrés le 18 juin 1997 ressortent
clairement du rapport de la deuxième audition puisqu'il y est fait mention de
son séjour dans le Bas-Zaïre à partir de cette date. Quant à la fonction de
la personne qui l'a aidé à s'enfuir de l'hôpital, il est souligné que l'auteur,
néophyte en la matière, n'a jamais réellement su s'il s'agissait d'un infirmier
ou d'un médecin; différence qui est, en RDC, encore plus difficile à déceler.
Enfin, quant au nom de cette personne, il est normal que l'auteur ait des difficultés
à s'en souvenir dans la mesure où un tel complice ne révèle que rarement son
nom pour assurer sa sécurité. L'auteur a essayé un nom au début de l'audition
et s'est ensuite abstenu.
5.3 Au sujet des autres arguments soulevés par l'Etat partie, l'auteur renvoie
au mémoire complémentaire du 4 juin 1998 qui a été soumis à la Commission suisse
de recours en matière d'asile. L'auteur y explique notamment pourquoi il a choisi
de rejoindre l'Europe par avion et comment il avait organisé son voyage afin
de ne pas être repéré. Il avait en fait obtenu un billet d'avion retour qui
appartenait à un ressortissant zaïrois, mais résident italien. Il affirme également
ne plus avoir de contact avec sa famille, ce qui l'empêche notamment d'obtenir
certains documents. Enfin, en ce qui concerne ses activités pour le régime et
ses activités politiques, l'auteur constate que fort peu de questions lui ont
été posées à ce sujet et qu'il n'a donc pas pu donner toutes les explications
nécessaires face aux doutes des autorités responsables de la procédure d'asile.
5.4 L'auteur estime que l'Etat partie n'a pas respecté ses engagements internationaux
dans la manière dont il a traité sa demande d'asile et ce, notamment, en déclarant
irrecevable le recours devant la Commission suisse de recours en matière d'asile
du 30 avril 1998 à cause d'un formalisme excessif (le dépôt des frais de recours
– 250 francs suisses - quatre jours après la date limite).
5.5 L'auteur précise que les observations de l'Etat partie relatives à sa communication
lui apportent une certaine satisfaction puisque ses motifs et ses arguments
se trouvent ainsi pour la première fois examinés au fond. Il regrette cependant
que cet examen n'émane pas de l'autorité judiciaire elle-même, normalement compétente
en matière d'asile, mais du gouvernement qui, en raison de la procédure, est
une partie à la communication et ne peut dès lors avoir l'indépendance et l'impartialité
du pouvoir judiciaire.
5.6 L'auteur considère que l'Etat partie s'est engagé par la signature de la
Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants à ne pas expulser, ni refouler, ni extrader une personne vers
un État où il existe des motifs sérieux de croire que celle-ci risque d'être
soumise à la torture. Pour analyser ce risque, l'Etat partie doit tenir compte
de toutes les considérations pertinentes, y compris l'existence de violations
systématiques des droits de l'homme dans le pays en question. Or l'auteur estime
que ces considérations pertinentes n'ont pas été examinées puisque à aucun moment,
les autorités suisses en la matière ne se sont penchées sur le fond de la demande
d'asile.
5.7 Au sujet de l'absence de certificat médical, l'auteur rappelle qu'il a subi
un examen à son arrivée en Suisse mais, ignorant les différents aspects de la
procédure, n'a pas pensé à demander que l'on examine les traces des sévices
qu'il a subis.
5.8 Quant à son activité politique au sein d'Hyochade, même si ses démarches
n'étaient pas politiques au sens strict, elles n'en étaient pas moins intenses
au point que l'on se souvient de lui à Kinshasa. En ce qui concerne le manque
de documents fournis pour prouver sa profession, il ajoute qu'aucun document
relatif à ses activités chez Hyochade ne peut se trouver encore chez son père
étant donné l'essence même des activités de cette société.
5.9 Enfin, l'auteur estime qu'il a apporté suffisamment de détails convaincants
qui attestent de la réalité de son récit et considère qu'un scénario inventé
se serait lui-même effrité de toutes pièces.
Délibérations du Comité
6.1 Avant d'examiner toute plainte contenue dans une communication, le Comité
contre la torture doit décider si elle est ou non recevable en vertu de l'article
22 de la Convention. Le Comité s'est assuré, comme il est tenu de le faire conformément
à l'alinéa a) du paragraphe 5 de l'article 22 de la Convention, que la même
question n'a pas été examinée et n'est pas en cours d'examen devant une autre
instance internationale d'enquête ou de règlement. Dans le cas d'espèce, le
Comité note aussi que tous les recours internes sont épuisés et que l'Etat partie
n'a pas contesté la recevabilité. Il estime donc que la communication est recevable.
L'Etat partie et l'auteur ayant chacun formulé des observations sur le fond
de la communication, le Comité procède à l'examen quant au fond.
6.2 Le Comité doit se prononcer sur le point de savoir si le renvoi de l'auteur
vers la République démocratique du Congo violerait l'obligation de l'Etat partie,
en vertu de l'article 3 de la Convention, de ne pas expulser ou refouler une
personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu'elle risque
d'être soumise à la torture.
6.3 Le Comité doit décider, comme le prévoit le paragraphe 1 de l'article 3,
s'il existe des motifs sérieux de croire que l'auteur risquerait d'être soumis
à la torture s'il était renvoyé en République démocratique du Congo. Pour prendre
cette décision, le Comité doit tenir compte de toutes les considérations pertinentes,
conformément au paragraphe 2 de l'article 3, y compris l'existence d'un ensemble
de violations systématiques des droits de l'homme, graves, flagrantes ou massives.
Toutefois, le but de cette analyse est de déterminer si l'intéressé risquerait
personnellement d'être soumis à la torture dans le pays où il serait renvoyé.
Il s'ensuit que l'existence, dans un pays, d'un ensemble de violations systématiques
des droits de l'homme, graves, flagrantes ou massives ne constitue pas en soi
une raison suffisante d'établir qu'une personne donnée serait en danger d'être
soumise à la torture à son retour dans ce pays. Il doit exister d'autres motifs
qui donnent à penser que l'intéressé serait personnellement en danger. Pareillement,
l'absence d'un ensemble de violations flagrantes et systématiques des droits
de l'homme ne signifie pas qu'une personne ne puisse pas être soumise à la torture
dans la situation particulière qui est la sienne.
6.4 Le Comité rappelle son observation générale sur l'application de l'article
3, qui se lit comme suit :
"Étant donné que l'Etat partie et le Comité sont tenus de déterminer s'il
y a des motifs sérieux de croire que l'auteur risque d'être soumis à la torture
s'il est expulsé, refoulé ou extradé, l'existence d'un tel risque doit être
appréciée selon des éléments qui ne se limitent pas à de simples supputations
ou soupçons. En tout état de cause, il n'est pas nécessaire de montrer que le
risque couru est hautement probable." (A/53/44, annexe IX, par. 6).
6.5 Dans le cas d'espèce, le Comité note que l'Etat partie fait état d'incohérences
et de contradictions dans les récits de l'auteur permettant de douter de la
véracité de ses allégations. Il prend également acte des explications fournies
par le conseil à cet égard.
6.6 Le Comité considère que les arguments développés par l'auteur à l'appui
des allégations de tortures qu'il aurait subies avant sa fuite de République
démocratique du Congo ne sont ni cohérents ni convaincants.
6.7 Le Comité estime que l'auteur ne lui a pas fourni d'éléments de preuve suffisants
qui lui permettraient de considérer qu'il est confronté à un risque prévisible,
réel et personnel d'être soumis à la torture en cas d'expulsion vers son pays
d'origine.
6.8 Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l'article
22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants, estime que la décision de l'Etat partie de renvoyer
l'auteur en République démocratique du Congo ne fait apparaître aucune violation
de l'article 3 de la Convention.
[Fait en français (version originale), en anglais, en espagnol et en russe.]
Notes
1. Gorki Ernesto Tapia Paez c. Suède, Communication No 39/1996, par. 14.5.
2. Babikir c. Suisse, Communication No 38/1995.
3. Seid Mortesa Aemei, Communication No 34/1995.
4. X, Y, et Z c. Suède, Communication No 61/1996.